Une biographie haute en couleur : l’histoire truculente de Phidias, le sculpteur de la Grèce antique
Une biographie haute en couleur : l’histoire truculente de Phidias, le sculpteur de la Grèce antique

reconstitution artistique de la statue de Zeus à Olympie attribué à Phidias basé sur des descriptions et représantations antiques.

Athéna du Varvàkeion. Statue de marbre de la 1re moitié du 3e siècles trouvée à Athènes près du lycée Varvàkeion en 1880. C’est la mieux préservée des copies connues . Haute de 1,045 m, elle est environ douze fois plus petite que l’œuvre originale.

Représentation idéaliser de Phidias exposée au musée du Louvre.
Le Michael-Ange de l’Antiquité (mais avec moins de vêtements)
Si Phidias avait eu un compte Instagram, Périclès aurait dû inventer l’ADSL plusieurs millénaires à l’avance pour gérer le trafic ! Entre ses statues monumentales qui faisaient pâlir d’envie ses rivaux et son agenda de ministre débordé, notre homme était le véritable influenceur de l’Athènes du Ve siècle avant J.-C. – à ceci près qu’il sculptait du marbre plutôt que de vendre des compléments alimentaires douteux.
Né vers 490 av. J.-C. dans une Athènes en pleine effervescence démocratique et culturelle, Phidias a eu le bon goût de pointer le bout de son ciseau à l’âge d’or de la civilisation grecque. Timing parfait pour un artiste ambitieux ! À l’époque, Athènes se remettait tout juste de sa victoire contre les Perses et se sentait pousser des ailes. L’heure était à la grandeur, à la démonstration de puissance, et qui mieux qu’un sculpteur de génie pour montrer aux voisins que les Athéniens avaient la plus grosse… influence culturelle ?
Des débuts à coups de marteau (et pas que sur le marbre)
Comme beaucoup de détails concernant sa jeunesse, la formation de Phidias reste aussi floue qu’un selfie pris en boîte de nuit. Selon Plutarque, il aurait d’abord été peintre avant de se tourner vers la sculpture – un peu comme si Picasso avait soudain décidé de se mettre à la taxidermie, mais avec plus de succès.
La tradition veut qu’il ait étudié auprès d’Agéladas d’Argos, un sculpteur renommé de l’époque. On imagine les premiers jours d’apprentissage : “Non, Phidias, on ne sculpte pas les narines comme ça ! Et arrête de gaspiller le marbre, ça ne pousse pas sur les arbres !” Phidias devait probablement lever les yeux au ciel en marmonnant que personne ne comprenait son génie.
Sa première commande importante fut une statue d’Athéna Promachos (la “combattante en première ligne”), une Athéna en bronze de 9 mètres de haut installée sur l’Acropole. Imaginez un peu : votre premier job d’importance consiste à représenter la déesse protectrice de la cité, visible à des kilomètres à la ronde. Pas de pression, hein ! Selon Pausanias, les marins pouvaient apercevoir la pointe de sa lance et son casque dès le cap Sounion, à 50 km d’Athènes. Le premier phare artistique de l’histoire, en somme.
BFF avec Périclès : quand l’art rencontre le pouvoir (et que ça fait des étincelles)
Le véritable tournant dans la carrière de Phidias fut sa rencontre avec Périclès, le leader politique d’Athènes. Ces deux-là s’entendirent comme larrons en foire, et Périclès le nomma superviseur de tous les projets artistiques de la cité. Autant dire directeur artistique de la startup nation athénienne !
“Écoute, Phidias, j’ai un projet pour toi,” aurait pu dire Périclès. “On a cette colline, l’Acropole, un peu défraîchie depuis que les Perses y ont mis le feu. Que dirais-tu de la transformer en vitrine de notre puissance ? Budget illimité, carte blanche artistique, juste un détail : il faut que ça en jette. VRAIMENT.”
Et “en jeter”, Phidias savait faire. Sous sa direction furent construits le Parthénon, les Propylées, l’Érechthéion et le temple d’Athéna Niké. Une opération immobilière qui ferait pâlir nos promoteurs contemporains. Phidias ne se contentait pas de superviser : il créa personnellement la statue colossale d’Athéna Parthénos, haute de 12 mètres, en or et ivoire (chryséléphantine), qui trônait dans le Parthénon. Une statue dont la valeur en matériaux précieux équivaudrait aujourd’hui au PIB d’un petit pays.
Les chefs-d’œuvre qui faisaient “Oh my Zeus !”
Si Phidias était déjà une star avec sa statue d’Athéna Parthénos, il atteignit le statut de légende avec sa statue de Zeus à Olympie, considérée comme l’une des Sept Merveilles du monde antique. Rien que ça !
Cette statue colossale de Zeus assis sur son trône mesurait 13 mètres de haut. Le dieu était représenté avec un corps en ivoire et des vêtements en or, tenant dans sa main droite une statue de Niké (la Victoire) et dans sa gauche un sceptre surmonté d’un aigle. Selon Strabon, si Zeus s’était levé, il aurait défoncé le toit du temple. Talk about making an impression!
L’écrivain Quintilien rapporte que cette œuvre “ajoutait quelque chose à la religion reçue” – comprenez : même les gens qui doutaient de l’existence de Zeus changeaient d’avis en voyant la statue. “Si les dieux ont une apparence, c’est certainement celle-là,” aurait déclaré un visiteur ébahi. Le premier cas documenté de marketing religieux efficace !
La technique chryséléphantine utilisée par Phidias était si complexe qu’elle nécessitait un entretien constant. Des serviteurs étaient chargés d’huiler régulièrement l’ivoire pour éviter qu’il ne se dessèche et ne se fissure dans l’atmosphère chaude et sèche d’Olympie. Imaginez le job : “Bonjour, je suis le responsable hydratation de Zeus, et vous ?”
Scandales, procès et exil : quand l’artiste préféré des dieux fâche les hommes
Être le protégé de Périclès avait ses avantages, mais quand les ennemis politiques de ce dernier cherchèrent à l’atteindre, Phidias fit un parfait bouc émissaire. Et là, les ennuis commencèrent à pleuvoir comme Zeus en mode tempête.
Premier scandale : Phidias fut accusé d’avoir détourné une partie de l’or destiné à la statue d’Athéna Parthénos. Heureusement, notre homme malin avait prévu le coup ! Sur les conseils de Périclès, il avait conçu les plaques d’or de manière à pouvoir les retirer et les peser. L’accusation fut démontée aussi vite qu’un meuble en kit mal assemblé.
Mais ses adversaires ne s’arrêtèrent pas là. Nouvelle accusation : impiété ! Le crime ? Avoir inclus son autoportrait et celui de Périclès sur le bouclier d’Athéna, parmi les figures combattant les Amazones. Un selfie avant l’heure qui lui valut gros ! Plutarque rapporte que Phidias se représenta sous les traits d’un vieil homme chauve soulevant une pierre des deux mains. Product placement dans une œuvre religieuse ? Les autorités athéniennes n’apprécièrent guère cette signature 2.0.
Selon certaines sources, Phidias fut emprisonné, puis s’enfuit vers Élis où il reçut la commande du Zeus d’Olympie. D’autres prétendent qu’il fut condamné à mort in absentia. Quoi qu’il en soit, la rock star de la sculpture antique connut une fin de carrière mouvementée.
L’héritage : quand votre nom traverse les millénaires (mais pas vos œuvres)
Ironie du sort : aucune des œuvres originales de Phidias n’a survécu jusqu’à nos jours. La statue de Zeus d’Olympie fut détruite dans un incendie à Constantinople au Ve siècle, et l’Athéna Parthénos a disparu sans laisser de traces. Nous ne connaissons son travail qu’à travers des descriptions, des copies romaines et des représentations sur des pièces de monnaie.
Cependant, l’influence de Phidias sur l’art occidental est incommensurable. Son style, caractérisé par l’idéalisation des formes humaines tout en préservant un naturalisme subtil, est devenu la référence absolue de la sculpture classique. Le “canon” des proportions qu’il perfectionna influença des générations d’artistes jusqu’à la Renaissance et au-delà.
Quand Michel-Ange contemplait le corps humain, c’était avec les yeux de Phidias. Quand Rodin modelait ses sculptures expressives, l’ombre de Phidias planait au-dessus de son atelier. Et quand vous admirez une publicité pour parfum avec un mannequin aux proportions parfaites, c’est encore un peu l’héritage de Phidias qui perdure.
Pausanias rapporte qu’à Olympie, on montrait encore l’atelier de Phidias des siècles après sa mort. Un panneau indiquait aux visiteurs : “Ici travaillait Phidias, fils de Charmidès, Athénien.” Le premier musée d’atelier d’artiste, en quelque sorte !
Conclusion : Le premier “influenceur” de l’histoire de l’art
Si Phidias vivait aujourd’hui, il aurait probablement une émission de téléréalité (“Pimp My Temple”), une ligne de vêtements (“Zeus Couture”) et serait invité à tous les galas de charité d’Athènes. Son compte TikTok montrerait des time-lapses de sculptures monumentales avec en fond sonore les derniers tubes de Pindare remixés par DJ Apollon.
Mais au-delà des scandales et de la gloire, Phidias reste l’incarnation même du génie artistique qui transcende son époque. Il ne se contentait pas de reproduire la nature : il la sublimait. Comme le disait Proclus : “Phidias ne modelait pas son Zeus d’après un modèle existant, mais d’après la conception qu’il aurait eue si Zeus lui était apparu en personne.”
Dans un monde sans photographie, sans cinéma et sans télévision, Phidias a donné aux Grecs ce dont ils avaient désespérément besoin : une image de leurs dieux, majestueuse et crédible. Il a transformé des divinités abstraites en présences concrètes et émotionnelles.
Alors la prochaine fois que vous verrez une publicité avec un mannequin aux proportions parfaites ou que vous admirerez la façade néoclassique d’un musée, souvenez-vous de ce sculpteur athénien qui, armé seulement d’un ciseau et d’un marteau, a défini pour les millénaires à venir ce que signifie la beauté idéale.
Et ça, même avec tous les filtres Instagram du monde, c’est un exploit que peu peuvent revendiquer.